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24 août 2016 3 24 /08 /août /2016 08:56
Quand Talon charme les syndicalistes

L’occasion était trop bonne pour que Patrice Guillaume Athanase Talon ne s’en saisisse pas. La première rencontre entre les responsables de centrales syndicales et le Président de la République du Bénin depuis l’avènement du Nouveau Départ a offert à ce dernier l’opportunité d’étaler encore ses dissemblances avec l’ancien Chef de l’Etat Thomas Boni Yayi. Au grand plaisir de l’ensemble des syndicalistes. En attendant que ça ne change. Car il y a environ dix ans, tout avait commencé avec presque autant d’enthousiasme partagé. Et on sait très bien dans quelle ambiance pernicieuse tout s’est achevé.

Dix années d’une collaboration parsemée de duperies. Dix années d’une collaboration parsemée de promesses souvent non tenues. Dix années de traitement inégalitaire des partenaires sociaux. Dix années de tentatives de division. Dix années durant lesquelles la coopération a tourné à la confrontation, voire même à la répression. C’est avec ce talus d’appréhensions dans la tête que Paul Esse Iko, Pascal Todjinou, Dieudonné Lokossou, Noel Chadaré, … sont allés le lundi 22 aout dernier, plus de quatre mois après son accession au pouvoir, rencontrer enfin pour la première fois le Président Talon. Une audience qu’ils auraient aimé avoir obtenu bien plus tôt en raison de l’urgence qu’ils jugent caractériser leurs revendications corporatistes, mais aussi au regard de leur contribution de premier plan à l’avènement de la Rupture. Pour avoir déjà trop attendu, c’est donc un Président sinon ingrat sur les bords, mais au moins peu au fait des réalités des conditions de vie et de travail des Travailleurs béninois que les leaders syndicaux s’attendaient à voir au Palais de la Marina ce jour-là. Erreur !

Exit le Président de la République qui fait patienter ses visiteurs des heures avant de les recevoir (parfois) dans un état d’euphorie personnelle indescriptible ! Exit le Président de la République qu’il faut saluer debout, devant qui il faut retirer son couvre-chef, à qui il faut parler sans s’asseoir… Exit le Président de la République qui en cinq heures d’audience parle tout seul pendant quatre heures et demie de choses et d’autres. Exit le Président de la République dont on quitte le bureau plus confus et perdu qu’on y est entré. Ça, c’est pour les questions de forme, et bien entendu, il faudra plus qu’une rencontre avec Patrice Talon pour s’en assurer définitivement.

Quant au fond, en a-t-on fini aussi avec les promesses faramineuses qu’on ne peut raisonnablement pas mettre en œuvre ? En a-t-on fini avec les mensonges et les subterfuges servis aux syndicalistes ? En a-t-on fini avec la création des syndicats dits "patriotes" confusionnistes et divisionnistes ? Qu’en sera-t-il lorsque les travailleurs organiseront éventuellement une marche de protestation ? Nous attendrons que le temps passe pour avoir réponse à toutes ces questions et à d’autres.

En attendant, l’opération de charme intitulée « Talon séduit les syndicalistes » a marché à fond. Aux dires même de ses interlocuteurs, le Chef de l’Etat se serait montré affable, attentif, voire taquin à certains moments. Il a annoncé la restauration prochaine de la Grande commission mixte paritaire de négociations Gouvernement-centrales syndicales. Il a écouté et admis les reproches qui lui ont été faits sur son style de gouvernance, sur certaines prodigalités gouvernementales, notamment en ce qui concerne la rémunération des membres de la commission des réformes politiques et institutionnelles, même s’il a cru bon devoir s’en expliquer. Il a accueilli favorablement les observations et recommandations qui lui ont été adressées dans le cadre de la rentrée scolaire à venir, la situation de crise à l’université d’Abomey-Calavi, le sort des travailleurs en général, etc.

Patrice Guillaume Athanase Talon vient encore donc de marquer un coup. De charme et de séduction. Bravo ! Mais, Paul Esse Iko, Pascal Todjinou et les autres connaissent ça. Et ils ne se laisseront pas duper encore une fois. La capacité de séduction ne fait pas toute seule la bonne gouvernance.

C’est mon opinion, et je la partage.

James-William GBAGUIDI

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